Aux cours de ces dernières années, le gouvernement du Canada s’est engagé, à plusieurs reprises, à s’appuyer sur les données scientifiques et les données probantes les plus fiables dans le cadre de son processus de prise de décisions. Pourtant, la transparence reste le chaînon manquant, ce qui rend difficile l’évaluation des progrès accomplis dans ce domaine et la capacité du public à évaluer le lien entre les données probantes et les décisions politiques. La politique gouvernementale étant par essence un bien public, la transparence permet de s’assurer que le public peut comprendre les facteurs qui ont conduit à une décision et pourquoi.
Dans le rapport Preuves à l’appui : un cadre pour évaluer l’utilisation des données probantes au Canada (2021), nous avons adapté un cadre de travail du Royaume-Uni pour évaluer la transparence des données probantes qui sous- tendent les décisions politiques et nous avons testé ce cadre sur sept politiques fédérales. Dans cette étude, nous avons appliqué le même cadre de transparence pour évaluer la transparence des données probantes dans le cadre de 100 politiques, au total, provenant de 10 ministères et organismes du gouvernement du Canada.
RÉSULTATS CLÉS:
- Nous avons appliqué un cadre de transparence pour évaluer la transparence des données probantes dans le cadre de 100 politiques sélectionnées au hasard à l’échelle de dix ministères et organismes fédéraux. En d’autres termes, le public non initié peut- il trouver les données probantes qui sous- tendent les décisions politiques? Le cadre se compose de quatre catégories :
- Diagnostic : que savent les décideurs politiques de la question?
- Proposition : quelle est l’intervention choisie par le gouvernement et pourquoi a-t-elle été choisie?
- Mise en œuvre : comment l’intervention choisie sera-t-elle mise en œuvre et pourquoi cette méthode a-t-elle été choisie?
- Mise à l’essai et évaluation : comment et quand saurons-nous si la politique a réussi?
- Dans l’ensemble, notre évaluation a montré que les politiques fédérales obtiennent un résultat faible en matière de transparence relative à l’utilisation de données probantes. Cela signifie qu’il est, encore aujourd’hui, très compliqué pour le public de trouver les données probantes sur lesquelles se fonde la politique gouvernementale. Trop souvent, les politiques ne fournissaient pas de références ou de citations pour les données probantes mentionnées et reconnaissaient rarement d’autres options politiques ou toute preuve absente, faible ou contradictoire.
- Les résultats obtenus en matière de transparence varient selon les ministères. Environnement et Changement climatique Canada est le ministère qui a obtenu les notes les plus élevées, en partie grâce aux énoncés détaillés des incidences réglementaires. Patrimoine canadien et Santé Canada sont les ministères qui ont obtenu les notes les plus basses. Toutefois, des notes d’évaluation plus élevées n’exigent pas nécessairement que les documents soient plus longs, les politiques pouvant obtenir des notes élevées en matière de transparence tout en étant concises.
- Il y avait quelques lacunes communes à tous les ministères. Trop souvent, les politiques ont omis de fournir des références ou des citations relatives aux données probantes mentionnées. À l’échelle de tous les ministères, presque toutes les politiques échouent (c.-à-d. un 0) dans la section des essais et de l’évaluation (c’est-à-dire, comment et quand une politique a été mise en œuvre). Elles explorent rarement les avantages d’autres possibilités d’actions ou reconnaissent qu’une preuve est absente, peu fiable ou contradictoire.
- Le cadre de transparence n’est pas une mesure parfaite. Notre cadre n’évalue pas la qualité des données probantes. En outre, si les données probantes qui sous-tendent une décision politique sont introuvables, cela ne signifie pas que ces données probantes n’existent pas ou qu’elles n’ont pas été prises en compte dans le processus d’élaboration de la politique.
- L’engagement en faveur d’une prise de décision fondée sur des données probantes est intrinsèquement politique. En appliquant le cadre de transparence, une question plus importante émerge : que signifie réellement le fait de traduire l’engagement politique envers les principes des meilleures données scientifiques et probantes disponibles dans l’élaboration des politiques en systèmes, structures et ressources de la fonction publique?
- La transparence n’est pas l’objectif final, mais plutôt la première étape d’une démarche visant à renforcer la confiance du public et à concrétiser l’engagement politique en faveur d’un processus décisionnel fondé sur des données probantes. La prochaine étape de ce projet consistera à étendre cette évaluation de la transparence à l’échelle provinciale, étant donné que l’élaboration des politiques est répartie sur plusieurs paliers de gouvernement. Nous poursuivrons également les discussions avec les gouvernements de toute la fédération canadienne afin de mieux comprendre les défis qui peuvent avoir un effet sur la transparence des données probantes dans les processus d’élaboration des politiques.
Ce rapport est également disponible en anglais.